Jadis, pour ouvrir les huîtres, on allait chercher dans le tiroir de la cui­sine un robuste couteau rouillé, qui ne coupait plus depuis belle lurette mais dont la lame épointée en acier allemand se jouait des belons les plus hermétiques.

Puis sans doute un ancêtre du Designer a réussi à placer dans presque toutes les cuisines un « couteau » à large garde censé désengorger les services d'urgence les jours de Noël…

Las, sa lame désespérément trop courte a fait se ruer bien des im­pa­ti­ents sur le premier Opinel venu, avec les conséquences que l'on sait…
Plus récemment  est apparu un outil efficace, pratique et élégant.

Son manche en bois rouge a des dimensions permettant une bonne pri­se en main et sa lame, en acier robuste, pas trop pointue, est de bonne longueur et possède même un biseau qui facilite l'insertion entre les valves du mollusque…

Tout devait désormais aller pour le mieux et puis le Designer fou a voulu rajouter son grain de sel :

Passe qu'il ait troqué le manche en bois par du plastique… Il faut bien sacrifier à la modernitude… et au lave-vaisselle…
Mais quelle tortueuse pensée sadique a donc guidé le crayon du Desi­gner lorsqu'il a remplacé l'extrémité du manche gentiment galbée et douce à notre paume par cette agressive mâchoire métallique de l'é­paisseur d'une lame de couteau ?
Je me suis laissé dire que cette encoche ravageuse pourrait servir à ébrécher le bord des coquilles pour mieux y engager la lame…

Bravo l'artiste !

C'est la paume endolorie qu'on dégustera nos coquillages… en pos­tillonnant discrètement les éclats de calcaire dans notre serviette…