Puisqu'hier, on était au bistrot, aujourd’hui, je remets la mienne !
« C’est un café comme les ultimes meurent. Une façade en bois vermoulu. Un bout de terrasse cernée par des fusains en caisse dépeinte. Du papier peint décoloré sur les murs. Des tables en bois cirées par l’usage prolongé. Une odeur de vinasse et de sciure mouillée. Et puis un patron en tricot déchiré, blanc de paresse et pas rasé, qui lit le Dauphiné Libéré derrière un rade de cuivre. Autour de moi, il y de gentils Savoyards qui causent avec leur bel accent où le suffixe « in » remplace la préposition « en ». C’est jour de marché, le vin blanc coule à flots. Des bérets basques assurent la liaison Alpes-Pyrénées. Des casquettes paysannes qu’on ne quitte que lorsque l’on vient d’en acheter une autre, masquent de leur visière brillante d’usure des regards enfoncés, plein d’une gentillesse malicieuse… ».
San-Antonio In « Concerto pour porte-jarretelles » – 1976
…en terrasse chauffée, mais avec une touillette en bambou !
En France l’État laisse chauffer les terrasses et EN MÊME TEMPS il appelle chez toi six fois par jour pour te demander si t’as entendu parler de l’isolation à 1 euro.
Cette fois-ci, l'intention malveillante n'est pas évidente. Pour peu que l'on prenne son petit noir avec du sucre, on subodore la taquinerie au moment de tourner sa petite cuillère. Elle semble animée de curieux soubresauts quand on touille son breuvage. Et l'on comprend l'origine de ces facéties quand, une fois le caoua avalé, on découvre que le fond de la tasse épouse les contours d'une volute hélicoïdale semblable à l'empreinte en creux d'une coquille d'escargot. Qu'est-ce qu'il nous a encore pondu là ? (Le Designer, pas l'escargot…) À défaut de certitudes, on ne peut qu'échafauder des hypothèses. Si l’on en croit les publicités chères à George Clooney, la mode est aux dessins plus ou moins chargés de messages subliminaux formés par la mousse sur le café… Cette spirale aurait-elle pour objet de former une élégante volute chargée d'émotion à la surface du breuvage ? What else ? Plus pragmatique : et si quelque zélé gastronome passé par l’Académie du Café (si, si, ça existe) avait décrété le retour à l'odorant café-filtre d'antan ? Cette coquille alambiquée aurait-elle pour fonction de piéger les quelques grains de mouture passés à travers ? Plus sophistiqué : un diéséliste émérite m'explique que le tourbillon engendré par un tel tortillon favorise la vaporisation du carburant dans certains moteurs ultra-performants. Il s'agirait donc là de favoriser l'exhalaison des arômes. Une explication qui ira droit au cœur de ces nouveaux caféologues distingués qui, en matière de finesse d’odorat, tiennent la dragée haute à bien des œnologues de salon. Plus mercantile : cette forme en vis d'Archimède ne permettrait-elle pas un rapide lavage sous le jet de vapeur du percolateur plutôt qu'un long séjour au lave-verres ? Time is money… au bistrot aussi !
On le voit, les desseins du Designer sont aussi impénétrables que les voies du Seigneur… De plus, il ne peut s'éviter de nous jouer sournoisement un dernier petit tour à sa façon en réutilisant la sous-tasse à reliefs excentrés dont nous avons déjà expérimenté les déboires le 25 octobre 2017 !
Jeff nous a ramené cette curiosité de ses pérégrinations en vallée d'Azergues
Cet article a été ajouté à la version livre (en pdf) de ► Le Designer fou a encore frappé dans CHAPITRE 3. À TABLE / LES CONTENANTS. ► La tasse à volute hélicoïdale Les liens vers Les séries de Guy (en pdf) sont dans la colonne de droite de cette page.
Ce commentaire d'un lecteur du New York Time a suscité bien des polémiques sur les réseaux sociaux :
« La France incarne tout ce que les fanatiques religieux haïssent : la jouissance de la vie ici, sur terre, d'une multitude de manières : une tasse de café qui sent bon, accompagnée d'un croissant, un matin ; de belles femmes en robes courtes souriant librement dans la rue ; l'odeur du pain chaud ; une bouteille de vin partagée avec des amis, quelques gouttes de parfum, des enfants jouant au jardin du Luxembourg, le droit de ne pas croire en aucun Dieu, de ne pas s'inquiéter des calories, de flirter et de fumer, de faire l'amour hors mariage, de prendre des vacances, de lire n'importe quel livre, d'aller à l'école gratuitement, de jouer, de rire, de débattre, de se moquer des prélats comme des hommes et des femmes politiques, de ne pas se soucier de la vie après la mort…
Aucun pays sur Terre ne profite mieux de la vie que les Français.(…)»
Je lui confère néanmoins le statut de Mot du Jour car, pour peu qu'on ait un peu parcouru le monde, on en appréciera toute la pertinence.
Un clin d'œil à Eve de Nice, qui a "liké" le post…
Journée faste pour les spécialistes de la larme de circonstance : deux trépassés célèbres à faire reluire le même jour !
Ce matin, pendant que ces tombereaux de fleurs dégoulinaient de la radio dans mon bol de café, cette chanson de Jacques Brel s'est installée dans mes oreilles…
This is the funniest thing I've read on Facebook all month. From a friend in Austin who I never would have called a “potty mouth” until reading this…
A bird just pooped IN MY MOUTH. I was riding my scooter on South Congress, with my helmet on but my visor up. And a bird pooped somewhere above me, and it hit me on, around, and in my mouth. MY FREAKING MOUTH. It’s not like I was riding around with my mouth agape. I didn’t even think it was open at all. My lips must’ve been just slightly parted, which honestly, makes the bird’s aim all the more impressive.
As I pulled over, I was quite confused for perhaps 3 or 4 seconds before the terrifying reality of what had just happened set in. Instinctively, I reached up with my hand, thinking maybe some big bug or something hit me in the face ? But the white, warm, slightly chunky goo on my fingers told a different story. “Oh my God,” I thought, “A bird just pooped in my mouth”. I could taste it. I mean, of course I could. That bird pooped right in my mouth. It tasted kind of sweet. Like yogurt. Sweet bird-shit-flavored yogurt. Panicking, with white gooey bird feces covering one hand and my mouth (my freaking MOUTH, y'all), I ran for the nearest restaurant door, desperately seeking a bathroom. It was locked. Locked out with a mouth full of shit. If that’s not Monday morning, I don’t know what is. Across the street, I saw a little café and ran to it. I walked in as calmly as one can walk with bird poop in your mouth, and quickly made my way to the bathroom, where I proceeded to give my mouth a whore’s bath. I swished my mouth out with soapy water, gagging the whole time, and scrubbed my tongue with a paper towel. I felt these measures were sufficient until I was able to get home to properly brush my teeth. And now, sitting here with my mouth once again shit-free, I’m full of questions. If a bird shitting on you is good luck, what does it mean when a bird shits in your mouth ? Should I buy a lotto ticket today ? Was this bird some kind of shit sharp shooter, or just really lucky ? What are the mathematical odds of this happening ? Am I going to have to include this when filling out medical history forms ? Be careful out there, friends. Sometimes life is a scooter ride on a beautiful day. And sometimes, on that beautiful day, a bird poops right in your mouth.
Appel au peuple :
Si, parmi le lectorat, quelque anglophone professionnel(le) pouvait me fournir une traduction qui serait moins littérale que celle que je ferais, je pourrais la publier à l'attention des abonnés au Word-of-the-Day qui, ne parlant pas anglais, pourraient me taxer de cuistrerie. MERCI !
Vidéo du 4 novembre 2013 ajoutée par le webmaster. Une fillette donne une autre version. Il semble que l'histoire de la fiente d'oiseau reçue dans la bouche soit un vieux fantasme des Américains. Au point de devenir une expression synonyme d'avoir de la chance. Peut ainsi se dire de joueurs qui gagnent un match contre toute attente. Un oiseau leur a “chié” dans la bouche. Tout se tient !
Une première tasse de café aussi savoureuse qu'une première gorgée de bière ! Quand elle se prend à l'heure ou la gent politique vient faire assaut de mauvaise foi sur les radios. Je vous livre la perle de ce matin ou un quelconque spécialiste venait justifier les lenteurs de la réforme :
« On ne passe pas de la nuit au jour du jour au lendemain ! »
Des sportifs de haut niveau ! Mais comment peuvent-ils donc tenir le coup à nous présenter ces numéros phénoménaux de contorsion intellectuelle jusqu’à des point d’heure dans la nuit sur les chaînes d’info en continu et tout à la fois trouver encore la ressource de venir s’invectiver par-dessus mon bol de café du petit matin ?
Bonus : Insérer dans le cliché de droite une photo de votre contorsionniste préféré
On peut commander un « petit noir » au zinc d’un café. Ou donner rendez-vous à des potes au cani du coin. Les ch’tis alternent gueuse et schiedam à l'estaminet. Les Alsaciens, c’est à la winstub qu’ils s’envoient un schnaps. Mais on peut tous se retrouver au rade pour un apéro. Ou s’encanailler au cabaret. Les vieux gones sirotaient du coco aux pieds-humides …puis Herriot leur autorisa des boissons plus convenables. Même des épiceries-porte pots ont vu le jour. Au stade, à l’Assemblée, à la kermesse, au p’tit bar du samedi soir, on picole pour pas cher à la buvette. Pas comme au buffet de la gare, ou l’on ne peut se taper une bibine pour accompagner son jambon-beurre-sans cornichon qu’au prix d’une vodka-caviar. Je lui préfère la gargote du coin. L’œuf dur au comptoir ne se trouve plus guère que dans quelques brasseries parisiennes. Et les pistaches remplacent les cacahuètes dans la plupart des bars. Mais on trouve encore des troquets sympas où le patron coupe quelques tranches de saucisson à l’heure du ballon de rouge. Le petit vin blanc, lui, c’est bien sûr à la guinguette qu’on le sirote à l’aise. Ou sous l’ombrage de la tonnelle du caboulot.
Au risque de passer pour un homme des tavernes, aidez-moi à compléter cette collection ! Expressions régionales recherchées
Ça commence par l’arrivée d’un plateau alvéolé chargé de tout le nécessaire. « Relevez la tête du lit ! Remontez-vous ! » Me voici donc le torse à 45°, une tablette réglable en butée sur mes genoux. À jeun depuis plus de 36 heures, n’importe quel Nescafé éventé me fera autant d’effet que George Clooney sur les filles de la machine à café ! Bien rempli, le plateau avec, en son centre, un bol plastique plein d’eau bouillante. Procédons avec ordre et méthode ! La dosette de Nescaoua (deux, ils ne sont pas chiens !) : un tube de papier plastifié réputé déchirable aux extrémités. A ben ouichtre ! On veut à tout prix éviter de s’ébouillanter Zézette, alors c’est sous la tablette qu’on produit les effets de cisaillement de la dosette. Et les grains de Nescafé dans les plis du drap blanc… Je vous dis pas ! Au sucre, maintenant. Beaucoup plus conviviales, ces deux pochettes de papier déchirables et réductibles en minuscules boulettes. Au tour du lait en poudre : encore un sachet récalcitrant qui ne délivrera quelques grumeaux de poudre humide qu’après un laborieux déchiquetage. Pour mélanger le tout, un alvéole du plateau propose une cuillère plastique sous un blister cellophane d’une remarquable résistance. Ayant été souventes fois confronté au problème, j’ai mon truc : s’appuyer (mollo, hein !) sur la tablette et transpercer ce simili-Kevlar avec le manche de la cuillère. Ça marche ! Bien eus ! Me voici rendu aux biscottes. Les deux paquets individuels de deux biscottes chacun (je vous le dis, on n’est pas chien !) sont aussi résistants que l’emballage des paquets familiaux, mais ils offrent bien moins de prise. On court à la catastrophe ! Même ruse que pour les bâtonnets de café : on procèdera sous la table pour éviter les éclaboussures. Raté ! À la rupture du sachet un choc minime du dos de la main sur le pied de la table et le bol n’est déjà plus aussi plein ! Tout est prévu ! Réparons les dégâts puisqu’une serviette Kleenex est mise à ma disposition…dans le sachet Kévlar de la cuillère qui n’est que perforé ! On verra ça plus tard. Le café refroidit et ma patience a des limites. J’ignore stoïquement le petit carré de beurre (il en existe deux versions : extra-dur ou plus-qu’à-point. Celui-ci en est au stade « coulant »). Je snobe également la capsule de confiture de prunes. Me voici donc arrivé à « l’instant-petit-déjeuner » sans trop d’encombres (Ah bon, vous trouvez pas ?) Je me mets en quête de mes biscottes qui jouent à cache-cache sous un impressionnant amas de cellophanes volatils et absolument infroissables. Et j’attaque un petit-déjeuner au lit comme en rêverait un prince ! Dans un tel contexte, il aurait été parfaitement anormal que j’échappe au coup de la biscotte qui casse. Bingo ! Ma belle chemise de nuit toute fraîche immaculée ressemble désormais à un test de Rorschach !
Il n’en a pas fini, le serveur ! Il lui faut encore amener le café… Il est bien vrai que le carré de chocolat supposé justifier le prix exorbitant du petit noir est difficile à loger sur le pourtour d’une sous-tasse, avec la petite cuillère. Le Designer fou nous place là encore sa solution de l’ovale gracieux. D’une courbe parfaite, cette soucoupe offre un vaste plateau sur lequel la tasse aurait pu être posée un peu n’importe où par un garçon peu soucieux de respecter les ésotériques proportions du nombre d’or… Prévoyant cet outrage à l’esthétique, le Designer fou a pourvu sa sous-tasse d’une légère empreinte en creux destinée à y centrer le fond de la tasse. Las, à l’image de ces fausses marches d’escaliers sur lesquelles on butte immanquablement, ce dénivelé a pile-poil la juste hauteur pour être la plupart du temps négligé par le serveur en plein coup de feu des fins de repas… Et il se confond une fois encore en excuses bredouillantes…
Post scriptum : C’est tout à fait par hasard que j’ai débusqué l’établissement sur lequel le Designer fou a jeté son dévolu pour tester ses inventions sataniques. Pour les sceptiques qui éprouveraient le besoin d’aller se rendre compte par eux-mêmes de la pertinence de ces propos, je les invite à réserver au « BUREAU » à Espalion, en Aveyron. On voit que ni sa qualité de « Relais Motard », ni son implantation dans ce petit coin idyllique mais reculé de notre belle France n’ont pu le protéger de la modernitude… C’est un peu dommage car tout en se voulant originaux, les plats proposés sont composés à base des savoureuses spécialités rurales régionales et l’accueil y est cordial et simple. Bref, en aucun cas un restaurant « Sodexho » comme pourraient le faire craindre sa classification en « Bar à bière – Pub – Brasserie », …et sa vaisselle !
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Ce Mot du jour dominical est extrait de mon recueil de Pages Choisies… Je le dédie tout particulièrement à Jacques, Ludo, André, Michel(s), Guy-Noël qui verront très bien de quoi il retourne… Pour les quelques uns et unes n’ayant jamais pratiqué les deux Savoies ou leur grande banlieue autrement qu’en station de ski, peut être auront-ils l’envie d’aller se rendre compte par eux-mêmes … Mais il faut faire vite ! BIZATOUS & BON DIMANCHE !
« C’est un café comme les ultimes meurent. Une façade en bois vermoulu. Un bout de terrasse cernée par des fusains en caisse dépeinte. Du papier peint décoloré sur les murs. Des tables en bois cirées par l’usage prolongé. Une odeur de vinasse et de sciure mouillée. Et puis un patron en tricot déchiré, blanc de paresse et pas rasé, qui lit le Dauphiné Libéré derrière un rade de cuivre. Autour de moi, il y a de gentils Savoyards qui causent avec leur bel accent où le suffixe « in » remplace la préposition « en ». C’est jour de marché, le vin blanc coule à flots. Des bérets basques assurent la liaison Alpes-Pyrénées. Des casquettes paysannes qu’on ne quitte que lorsque l’on vient d’en acheter une autre, masquent de leur visière brillante d’usure des regards enfoncés, plein d’une gentillesse malicieuse ».
San-Antonio In « Concerto pour porte-jarretelles » – 1976