La naissance de la cigale
Cette année, c’est avec une dizaine de jours d’avance sur son calendrier traditionnel que, hier, elle a donné son premier tour de chant… Mais ce n’était peut-être pas une bonne idée que de lui organiser un spectacle son et lumière accompagné du jeu des grandes eaux dès sa première nuit parmi nous !
A lire avec l’accent…
Elle se pétrifie lentement au soleil. Sa carapace chauffe, se rigidifie légèrement et peu à peu se fend sur le dos avec une lenteur exaspérante de fermeture à glissière maniée de main experte par une effeuilleuse aguicheuse. La fente s’ouvre un peu plus et une sorte de bulle verte gonfle et grandit. C’est la face dorsale de l’abdomen qui apparaît de cette façon. Le reste va suivre naturellement, très lentement. D’abord les pattes, le thorax, et enfin la tête munie cette fois d’énormes yeux globuleux. Une sorte de monstre monolithique s’extrait ainsi d’un scaphandre rigide.
Tout s’est passé très lentement, mais vient le moment où l’insecte parfait est entièrement sorti de sa carapace. Il s’accroche sur elle qui reste définitivement agrippée à sa branche.
On va retrouver durant tout l’été des scaphandres pétrifiés de cigales accrochés aux tiges basses. Aucun prédateur n’est intéressé et seul le vent et les intempéries vont en faire disparaître les traces.
Mais en vérité, quel évènement étonnant cette cigale toute verte qui déplie lentement ses membres, six pattes et quatre ailes à la chaleur du soleil et qui reste immobile pendant des heures pour que tout le corps soit bien sec et change enfin de couleur. Tant qu’elle est verte, elle n’est pas prête à s’envoler ; on dit en Provence « es pa madure » : elle est pas mûre. Ce qui est assez logique puisqu’elle mûrît lentement, elle achève son ultime lifting, elle bronze sous les rayons du soleil, mais tout cela se déroule avec une somme de risques incalculable… Songez que l’insecte est quasiment paralysé pendant près de cinq heures depuis sa sortie du sol et qu’il n’a aucun moyen de défense contre les goinfres de toutes sortes…
La majorité des cigales sera dévorée…
Le conteur de France Bleue Provence
(dans les années quatre-vingt dix)
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