1er mai – Calembredaines Les minuscules plaisirs d'une audition déclinante (2)
Hier matin, c'est en ne faisant pas la liaison entre les deux termes du patronyme du président de « Debout la France » que Frédéric Pommier, dans sa revue de presse m'a gratifié d'un succulent : « Dupont-et-néant ». Ce matin, en revanche, j'ai bien entendu un autre chroniqueur nous dire que le candidat d'« En Marche » était au pied du mur. Car bien sûr « c'est au pied du mur qu'on voit… ». Et c'est sans l'aide de personne, si ce n'est de l'actualité, que je me suis pris à évoquer tous ces candidats de la société si vile…
Tout ça vaut bien un brin de muguet…
Chanson composée en 1953 par Pierre Destailles (paroles) et Claude Rolland (musique)
Vendredi dernier, sur France Inter, François Morel interpellait Patrick Cohen :
« Patrick, je ne voudrais pas vous faire de reproches ; qui serais-je moi, petit chroniqueur ignorant pour vous chercher des noises, pour vous chercher des poux dans votre toison splendide ? Mais il se trouve que, pas plus tard que la semaine dernière, je crois que c’était vendredi, à ce même micro, au sujet d’un récent discours du Président de la République vous avez dit : “Il semblerait que son discours n’ait pas spécialement impacté les différents sondages concernant la présidentielle”. Je me permets de vous signaler cet anglicisme déplacé parce que les auditeurs de France-Inter sont très attentifs et très sensibles aux erreurs qu’on peut faire ». (…) Mais la peine de mort, ça ne peut pas s’appliquer raisonnablement à quelqu’un qui dit “du coup” ou “c’est juste merveilleux". Franchement… C’est trop (*), c’est démesuré »…
(*) C’est trop : Tiens, il l’a oublié celui-là !
Et aussi, comme le relève San-Antonio (Y en avait dans les pâtes) : « J’avais complètement occulté l’incident. Maintenant on n’oublie plus, on occulte ». Citation qui me retombe sous les yeux bien à-propos…
Tout comme les auditeurs de France Inter, les lecteurs (trices) du Mot du Jour sont très attentifs et très sensibles aux oublis que je peux faire. Ainsi, on (*) me fait remarquer que j’aurais dû aussi mentionner « en fait ». Ce « en fait » qui, répété à outrance deux ou trois fois par phrase, est particulièrement « impactant » sur mon humeur, et qui, « du coup », réveille aussi en moi des instincts homicides. On (*) me cite l’exemple d’un guide touristique érudit aux explications fort intéressantes, malheureusement ponctuées de « en fait » à foison. On n’entend finalement même plus ce qu’il dit, les « en fait » « occultent » le reste du discours…
C’est tout à fait par hasard que j’avais assisté en direct à la télévision à la toute première sortie des nouveaux ministres de l’Élysée. On installe des gradins mobiles dans la cour du Palais, tout comme sur le littoral niçois au moment du Carnaval. Une foule de journalistes y est parquée sous la surveillance d’un cerbère aux allures de videur de boîte de nuit. Les ministres font monter le suspens en déambulant comme tout naturellement à l’intérieur du bâtiment, de droite à gauche et de gauche à droite d’un pas suffisamment affairé pour qu’on les imagine préoccupés par l’avenir de la planète, mais pas trop vite quand même, qu’on ait le temps de les apercevoir, voire de les reconnaître.
Puis, quand on a assez joué de l’impatience du public, la véritable sortie commence. Ils s’égrènent un par un, marquent un temps d’hésitation, comme éblouis par d’imaginaires spotlights avant de descendre élégamment le perron. Ils traversent alors la cour, à la toute juste bonne distance des gradins pour que les interpellations des journalistes s’apparentent à des vivas, mais suffisamment loin pour que leurs courtes réponses préfabriquées ne soient qu’à peine audibles. Les plus cabots vont jusqu’à se détourner de leur droit chemin pour offrir leur meilleur profil aux caméras. La scène en était grotesque, à ce point surjouée ! Ce matin, un chroniqueur politique à résumé cette longue description en cette image succincte : « La différence entre le Festival de Cannes et la sortie du Conseil des Ministres, c’est qu’à l’Élysée on descend les marches avant d’avoir tourné le film ».