À la une
Comme à l'accoutumée, les nemrods se retrouvent au point du jour chez Dédé, à l'Auberge des Chasseurs. Tout en sirotant leur rituel petit noir accompagné de pains au chocolat et de croissants frais, ils suivent avec attention l'énumération des conseils de sécurité que Pierrot, le chef de battue, ressasse inlassablement à chacune de leurs retrouvailles agrestes.
Puis chacun revêt la chasuble orange-luminescent réglementaire par dessus sa tenue de camouflage sylvestre, et, le fusil cassé au creux du bras, ils rallient le périmètre où, aujourd'hui, ils veilleront sur la nature tout en s'efforçant de réguler la population des sangliers prédateurs des pelouses des villas alentour.
Gaspard rejoint son poste habituel : adossé à un grand pin parasol, un petit banc rudimentaire qu'il a confectionné à l'aide de deux blocs de roche calcaire et d'une bûche de pin incomplètement consumée récupérée après le rituel barbecue que la troupe organise chaque saison à l'occasion du repérage des drailles.
Sous ce banc de fortune il remise la musette où, avec Var Matin, il range sa bouteille de Volvic et quelques barres chocolatées en prévision du petit creux qui pourrait perturber sa vigilance.
Ce matin, Gaspard n'est pas chanceux… Il entend les aboiements de chiens s'éloigner à l'opposé de son secteur et il trompe son ennui en observant les écureuils peu farouches qui glanent les pignes de pin à ses pieds.
Il lui faudra revenir en solo avec les munitions adaptées pour réguler un peu ces effrontés qui mettent à mal le devenir de la forêt en se nourrissant de ses semences ! Il en profitera pour tirer une brochette de ces rouge-gorge voraces qui déciment sans vergogne nos colonies de mouches, araignées et autres scolopendres…
Gaspard en est là de ses rêves de safari quand la trompe de Pierrot vient sonner la fin de la battue. Enfin ! La matinée commençait à lui paraître longue. Gaspard récupère sa musette. En véritable écolo soucieux de l'environnement il enterre sous d'efficaces raclements de Pataugas la dizaine de mégots qu'il a dispersés. Il casse règlementairement son fusil et se dirige vers son Jeep-Wrangler 2.2 litres Diesel, engin surpuissant parfaitement adapté à ses missions écologiques de protection de la nature. En chemin, il réalise que, tout à ses projets de safari régulateurs, il a bien involontairement enfreint le règlement qui prescrit que le fusil se transporte cassé et désarmé. Fort heureusement personne n'est là pour constater son manquement. « Mais où sont-ils donc tous passés » se demande Gaspard in petto, tout en se réjouissant d'avance d'échapper à l'obligation de payer la traditionnelle tournée générale de Diabolo-menthe qui sanctionne immanquablement cette infraction au règlement.
Que se passe-t-il alors ?
Nul ne le sait. Pas plus que l'on ne sait qui a découvert Gaspard baignant dans son sang, mortellement blessé par la cartouche qu'il était en train d'extraire de la chambre de son fusil…
La nature est bien ingrate, qui ne veille pas sur ses protecteurs…
NDLR : Le Mot du Jour n'est pas assujetti aux contraintes rédactionnelles des journalistes de Var-Matin qui, eux, ne peuvent pas mettre en lumière le contexte et les circonstances de tels drames :
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