À Erato
La première rencontre, c’a été avec Lucie Delarue-Mardrus, dont le nom nous était si difficile à prononcer à la fin de la récitation, au cours préparatoire… Puis il y a eu Émile Verhaeren et ses rafales de vent cornant novembre…
C'est aussi à l'école primaire que le père Hugo, qui n'en était pas à un cliché près, m'a présenté Maître Yvon qui soufflait dans son biniou et ses presque-veuves de marins pêcheurs et leur marmaille…
Un peu plus tard, Prévert m'a fait connaître l'amiral Larima, qui ne rime pas à grand-chose, Barbara ruisselante sous la pluie et le petit bruit de l'œuf dur sur le comptoir d’étain. Trénet m'a baladé dans son jardin extraordinaire puis, à la même époque j'ai connu de leur vivant les œuvres de Brassens, Brel, Ferrat, Léo Ferré… enfin les grands contemporains populaires.
Il a bien fallu aussi, à l'âge adulte, me confronter aux pots de yaourts dans la vinaigrette de Jacques Higelin.
Toute cette patiente initiation poétique pour enfin être en mesure d'apprécier pleinement la richesse de la rime et la métrique puissante des strophes lourdes de sous-texte de Bertrand Belin :
Il y avait un homme ce matin
Comme hier d'ailleurs
Il y avait un homme ce matin
Sur le cul
Il y avait un homme ce matin
Ainsi qu'une femme
Sur le cul
Comme hier d'ailleurs
Il y avait dix hommes ce matin
Ainsi que dix femmes
Sur le cul
Des enfants couraient mignons
Après les pigeons
Qui s'envolaient
Puis se reposaient
Sans relais
Comme hier d'ailleurs
Puis se reposaient
Il y avait cent hommes ce matin
Ainsi que cent dix femmes
Sur le cul
Ça s’appelle « Sur le cul », c’est de Bertrand Belin, et ça se trouve facilement sur ► YouTube
Comme quoi, grâce aux Play-lists de grève, on peut encore s'ouvrir à l'esthétisme.
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