Un classique en raccourci
Souvent, après déjeuner, entre Jean-Pierre Pernaut et la sieste, je m'offre une parenthèse cinématographique sur Arte.
Hier, c'est une version à grand spectacle en Technicolor du Cid qui a bercé ma somnolence post-prandiale.
Mais ce ne sont ni la mâchoire au carré de Charlton Heston, ni la bouche pulpeuse ou le buste agressif de Sophia Loren qui ont pu empêcher mes paupières de tomber, à peine le bellâtre venait-il de trucider son ex-futur beau-père.
Hollywood n'a pas réussi à rendre plus digeste la grandiloquence du père Corneille et pire, le scénario se perd dans d'inutiles digressions qui n'en finissent pas.
Au début du siècle dernier, on savait faire plus concis. Trois quatrains et une chute et tout est dit :
LE CID
Le palais de Gormas, comte et gobernator Est en deuil… Pour toujours, gît couché sous la pierre L’hidalgo dont le sang a rougi la rapière De Rodrigue, appelé le « Cid Campéador »… Invoquant à genoux les deux saints Paul et Pierre Chimène en voiles noirs s’accoude au mirador, Et ses yeux, dont les larmes ont brûlé la paupière, Regardent sans le voir, mourir le soleil d’or. Mais un éclair, soudain, fulgure en sa prunelle Sur la plazza Rodrigue est debout devant elle. Impassible et hautain, drapé dans sa cappa, Le héros meurtrier à pas lents se promène… « Dieu, soupire à part soi la plaintive Chimène, Qu’il est joli garçon, l’assassin de papa !… » |
Georges Fourest (1864-1945)
In “La Négresse blonde” (1909)
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