Mise à part mon affectueuse compassion pour celles et ceux qui doivent faire ça tous les jours, tout est dans la suite ! Bonne semaine à tous ! Guy
Cette fois–ci, ils ne m’auront pas ! Je joue sur du velours : la liste des trois articles à rapporter est on ne peut plus simple : – Du pain (« un peu plus que d’habitude, on a des invités ! ») – Du concentré de tomate (je l’ai fini hier en préparant mon Armoricaine) – Du rhum brun (Une petite bouteille de Négrita pour la pâtisserie.) De plus, la jungle du supermarché est momentanément désertée par les habituelles Amazones qui mènent leur Caddie comme Ben Hur menait son char.
Je décide de jouer la ruse.
Non, cette fois je ne m’échapperai pas de la file de caisse pour aller marauder ma baguette à la dernière minute ! Pour être sûr de ne pas l’oublier, le pain sera ma première station.
Au rayon du bas, en dessous des multiples pains de fantaisie, de régime, complet, à trancher… j’avise nos baguettes habituelles. Trois panières côte à côte, qu’une employée est justement en train de recharger. Trois panières dûment étiquetées « Baguette–Poids–Prix », le tout bien visible malgré le chariot de réassortiment…
Et « un–peu–plus–gros–que–d’habitude » ? Comment ça s’appelle ? flûte ? restaurant ? bâtard ? ; et où ont-ils bien pu me le cacher ?
J’avais bien tort de jouer les fiers–à–bras, les démons de la jungle consuméristes ne me feront aucun cadeau… Il faut me résoudre à composer avec l’adversité :
– Bonjour Mademoiselle (Ne surtout pas oublier le Bonjour si vous ne voulez pas vous le voir jeter à la figure avant toute autre forme de réponse !) Qu’avez–vous plus gros qu’une baguette ?
Et là, accompagnant sa réponse d’un regard noir de khôl et de commisération, la Bardot des supermarchés de lâcher : – Ben là, un restaurant–han
Tout en me désignant la dernière panière de baguettes, où se sont fourvoyés quelques « Restaurants », au–dessus d’une minuscule étiquette code–barres…
J’ai foiré ma première épreuve…
Ressaisissons–nous. Je devrais normalement me racheter à l’épreuve du concentré de tomate puisque lors d’une expédition antérieure j’avais appris que ces lots de trois petites boîtes se tapissent loin des conserves de tomate, dans la travée des Sauces & condiments…
… … …
J’étais pourtant bien sûr que c’était là !
Trois allers–retours de contrôle, rien… Double vérification à la travée suivante sans plus de résultat… Retour mécanique irrépressible à la cache supposée…
Au deuxième passage je repère, tout en bas, des petites boîtes d’un volume voisin du trésor recherché renversées à même le sol…
Bingo ! C’est à quatre pattes, les yeux au ras du sol, que j’extrais le trésor convoité du fin fond de la plus basse étagère de la gondole…
Certes, la deuxième épreuve n’est pas remportée avec beaucoup de panache, mais je ramène l’article demandé…
Troisième et dernière épreuve : une petite bouteille de rhum Négrita. Ce coup ci, pas de problème d’orientation, je file directement au rayon Alcools. Et là, de la démarche auguste et solennelle d’un Président inspectant le front des troupes, je passe en revue l’alignement des vins et alcools figés dans un garde-à-vous rigolard…
Et oui, j’ai bien l’impression que ces bouteilles se paient ma fiole !
Trois passages à épier les alignements d’un œil inquisiteur, une longue station devant les cinq étagères de rhum blanc consacrée à scruter chaque flacon au fond de l’étiquette, des fois qu’un bronzé se serait infiltré parmi tous ces blancs… Rien…
Je dois à nouveau faire appel à un « caviste » de service.
Bien élevé, il feint de masquer son exaspération et m’entraîne deux gondoles plus loin que les rhums blanc, à côté des vins rouges issus de différents pays de la Communauté européenne où, bien à l’abri des regards derrière les premières bouteilles de whisky, deux bouteilles du Négrita brun espéré n’attendaient qu’un peu d’attention de ma part…
Je fais mon mea culpa auprès du caviste que j’avais osé déranger (Bonjour !) dans sa patiente mise en rayon, en reconnaissant que j’étais décidemment bien stupide de m’entêter à chercher le Négrita au rayon des rhums…
(Ça sert à rien, mais ça soulage…)
Plus que l’épreuve de la Caisse et je peux rentrer au Camp récolter les vivats de mes équipiers…
La piste est bien dégagée en cette matinée de semaine. Le retraité qui me précède n’a pas oublié de peser ses pommes et il règle en liquide, sans coupon de réduction !
La chance me sourit à nouveau… sauf…
Sauf que mon lot de trois petites boîtes de concentré de tomate, sans doute un champion de cache–cache, avait échappé à l’étiquetage…
C’est avec son sourire le plus enjôleur que la blonde Sylvie Vartan qui tient la caisse me demande d’aller lui chercher le prix… Et c’est avec la même exquise courtoisie que je la prie de bien vouloir faire remettre cet article au rayon où je l’ai trouvé…
Me reste à retourner au Camp avec seulement deux des trois totems que je devais rapporter…
Ma mission est lamentable… Je serai éliminé au prochain Conseil…
Vécu à Six–Fours les Plages, le 16 octobre 2009
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