À quelque chose malheur est bon…
Cherchant en vain à me rendormir, peu après cinq du mat', à l'heure où les semi-remorques déchargent à grand fracas leur cargaison sur le parking du Carrefour voisin, cette fabulette moralisatrice m'a tellement pris le chou que je me suis levé pour aller arroser avant le lever du soleil…
Le laboureur m'a dit en songe : « Fais ton pain,
Je ne te nourris plus, gratte la terre et sème ».
Le tisserand m'a dit : « Fais tes habits toi-même ».
Et le maçon m'a dit : « Prends ta truelle en main ».
Et seul, abandonné de tout le genre humain
Dont je traînais partout l'implacable anathème,
Quand j'implorais du ciel une pitié suprême,
Je trouvais des lions debout dans mon chemin.
J'ouvris les yeux, doutant si l'aube était réelle :
J'entendais des camions s'abaisser les ridelles
Les Fenwicks baladaient des palettes surchargées
Je connus mon bonheur et qu'au monde où nous sommes
Nul ne peut se vanter de faire taire les hommes ;
Et de vouloir fermer tous les supermarchés
d'après ► René-François Sully Prudhomme
(► poésie : Un songe),
avec l'aide de la canicule et de la grande distribution.
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