Je n'ai trouvé que cette vidéo, d'une quali­té d'image médiocre, sur Claude Bruaire.
J'ai longtemps hésité à la publier ici car je suis moins fan de ses positions sur l'éthi­que (nom savant de la morale) médicale, trop proches des anti-IVG, que de la clar­té de ses arguments métaphysiques. Néan­moins je retrouve dans cette vidéo enre­gistrée en 1985, soit vingt ans après avoir suivi ses cours au lycée de Vincennes et un an avant sa dis­parition due à un cancer, à l'âge de 54 ans, son phrasé et ses tour­nures de langage que nous nous amusions à imiter, mon ca­marade Gérard Robert et moi. « Ceci est une absurdité », « Aristote, notre père à tous », « chaque fois qu'arri­ve un être hu­main arrive tout un monde neuf », « ce­ci est un sophisme ^(ℹ)Un sophisme est un procédé rhétorique, une argumentation, à la logique fallacieuse. C'est un raisonnement qui porte en lui l'ap­parence de la rigueur, voire de l'évidence, mais qui n'est en réalité pas valide au sens de la logique, quand bien même sa conclu­sion serait pourtant « vraie ». » sont nos madeleines de Proust, si j'ose dire.

Lundi chargé Nous subissions 6 heures de philo le lundi (4 le matin, 2 en début d'après-midi), 2 heures le mercredi matin et personne ne s'en plaignait. L'en­seignant savait capter l'attention de son auditoire. Aussi ai-je été flatté, après mon exposé, à son bureau devant la classe, sur « La Ma­ladie mor­telle », de Søren Kierkegaard, qu'il me conseille de continuer dans la phi­losophie après les études.
Mais j'avais déjà le journalisme en point de mire. Et c'est finalement ce que j'ai fait.

Un excellent pédagogue. Je me sou­viendrai à vie de son premier cours devant des élèves qui ignoraient tout de la phi­losophie et qui ne savaient pas à quelle sauce ils allaient être mangés. Il a passé cette heure à nous expliquer la dialectique du maître et de l'esclave, de Hegel. Un auteur difficile dont il était un spécialiste. Nous avons tout de suite compris qu'il nous prenait au sérieux. Et au terme de sa lumineuse analyse, nous savions ce qu'é­tait la philosophie.

Soutenance de thèse En 1964, Gérard Robert et moi avons assisté à sa soutenan­ce de thèse à la Sorbonne devant les som­mités de la philosophie de l'époque. On en­trait alors dans la prestigieuse université comme dans un moulin. Je me souviens y avoir assisté une autre fois, par curiosité, à un cours de philologie ^(ℹ)Étude d'une langue et de sa littérature à partir de documents écrits. Le philologue compare les versions conservées de ces textes, ou rétablit le meilleur texte en cor­rigeant les sources existantes. auquel je n'ai pas compris un traitre mot.
La première partie de la thèse de Claude Bruaire portait sur Hegel (Logique et reli­gion chrétienne dans la philoso­phie de Hegel, Éditions du Seuil), la seconde partie exposait son travail personnel (L'Affirma­tion de Dieu : Essai sur la logique de l'exis­tence, Éditions du Seuil).