Je vais trop rarement marauder mes Mots du Jour dans les pages « Sport » de mon quotidien favori. On y trouve pourtant quelques succulentes friandises…
Euphémisme \ø.fe.mism\ masculin
Atténuation de faits ou d’idées désagréables, tristes ou choquantes en les exprimant de façon plus douce, plus indulgente, plus décente.
Pas une semaine, que dis-je, pas une journée sans qu'on nous assène une culpabilisante injonction sanitaire. Et ne buvez pas ci ; et ne mangez pas ça… Avec puissante démonstration scientifique à l'appui, voire descriptions effrayantes des effets sur notre santé des sucres, des huiles, des colorants, émulsifiants ou autres agents de texture ou exhausteurs de goût… Tout cela est bel et bon et l'on en vient, par sagesse ou par civisme, à éplucher de près les étiquettes du plus anodin paquet de biscuits. Force est de constater que, de répétition de conseils en spots de publicité, les prescripteurs de la santé publique sont devenus crédibles. D'autant plus qu'on les suppose proches du monde médical, travaillant de concert à la mise en œuvre de ces doctes principes prophylactiques. Mais l'industrie de la malbouffe s'est allié un efficace diable tentateur : le distributeur automatique de boissons et friandises. Celui que j’ai croisé hier expose opportunément ses appâts empoisonnés face aux rangées de sièges d’une salle d'attente. Une aubaine : clientèle prisonnière, longues attentes indéfinies, salle surchauffée, tous les ingrédients sont là pour que notre petit lutin maléfique personnel nous susurre : « Ça commence à faire long… Si tu grignotais quelques chips en attendant ? » ou bien « Ta patience mérite bien une petite récompense ! Que dirais-tu d'une barre chocolatée ? Il y en a tout un choix » ou bien encore « On crève ici ! La bouteille de Coca est un peu grande, mais t'es pas obligé de la finir ! ». « Et puis, tu as la caution de la Faculté ! ce distributeur n'est-il pas mis à ta disposition dans le hall d'attente d'un Établissement Hospitalier ? » C'est un peu l'absolution pendant le péché… Sacré Hippocrate ! Tu fais un bel hypocrite !
Hier, je vous faisais part d'un de mes petits bonheurs de tous les jours à travers l'écriture de Clotilde de Brito. Pour Daniel Pennac, écrivain plus académique, la reine des slameuses s'est laissé aller à nous dévoiler un autre plaisir minuscule « pour que jamais personne ne l'empêche de manger des œufs mayonnaise ». Perso, c'est pas mon truc mais il en faut pour tous les goûts :
L'œuf-Mayonnaise
Souvent au restaurant je m’enquiers des entrées… Fi de la macédoine ou des tranches de pâté, Des bouquets de crevettes, des salades landaises, Je n’ai d’appétit, moi, que pour l’œuf mayonnaise !
Comme faisait Môman, avec des p’tits oignons, Avant le gigotin ou la tourte aux rognons, C’est là ma madeleine, ce qui me remplit d’aise, Ce goût de beau dimanche dans les œufs mayonnaise
Il faut évidemment qu’ils soient bien préparés, Le jaune encore fondant, le blanc assez nacré, La sauce bien légère (pas une crème anglaise !). C’est tout un art, mon cher, les bons œufs mayonnaise.
Le docteur désapprouve, mon épouse le soutient, Mes bons amis se taisent mais n’en pensent pas moins. À tous ces rabat-joie je réplique : « Foutaises ! Il n’y a rien de plus sain que des œufs mayonnaise ! »
À m’en lécher les doigts, à tacher ma chemise, Je les préfère à toutes les autres friandises. Vous ne blâmez personne pour des envies de fraises, Pourquoi vous acharner sur les œufs mayonnaise ?
Alors je le déclare, alors je vous le clame, Rien ne peut m’emmerder, rien ne me trouble l’âme (Et peu m’importe même qu’à table l'on soit treize) S’il y a devant moi de bons œufs mayonnaise.